27 mars 2007

Kinshasa après les affrontements

A quelques jours des affrontements du jeudi 21 mars entre l’armée congolaise et la garde de Jean-Pierre Bemba, candidat malheureux aux élections présidentielles de 2006, voici le témoignage d’une coopérante belge se trouvant sur place :

« La situation tranquille n’est pourtant que apparente. On attend que le temps passe pour avoir plus d’informations, même si ici, nous sommes surtout désinformés par les rumeurs contradictoires qui circulent et les différentes chaînes nationales et internationales qui diffusent des informations tronquées.

Jeudi 21 mars à midi quand les affrontements ont éclaté je me trouvais au bureau, non loin du quartier où avaient lieu les plus grand affrontements. Les crépitements des balles et les tirs de mortiers nous ont coincés au bureau. Le personnel national est parti en vitesse, habitant dans les quartiers encore alors à l’opposé des événements. Nous avons dû tout d’abord nous réfugier à terre dans les couloirs, à l’abri des fenêtres et des murs de béton. Le soir, nous sommes restés dormir sur place. La malle de nourriture de sécurité était à moitié périmée et nous n’aurions pas pu tenir beaucoup plus longtemps étant à cinq plus les deux gardiens. Le vendredi matin vers 6h cela a éclaté de plus belle et plus près de chez nous. Les forces gouvernementales s’étaient positionnées la nuit pour encadrer les rebelles à l’aube. Vers 11h, la situation s’est apaisée mais non sans quelques tirs d’obus ou de balles sporadiques et plus éloignés. Vers 15h, les nerfs des collègues, séparés de leurs enfants commençant à être plus que tendus, nous avons pris les petites rues pour rejoindre nos habitations respectives.

Heureusement, aucune balle ni obus n’a pénétré les lieux mais ce n’est pas le cas pour le boulevard du 30 Juin, l’artère principale, fortement marqué par les affrontements. Les pillages semblaient commencer et il valait mieux bouger. On doit d’ailleurs toujours rester sur le qui-vive. Il est clair que le sommeil est plus qu’agité même si en apparence chacun croit gérer la situation. Sans s’en rendre compte, chacun a dû prendre sur soi et maintenant l’inconscient travaille... Chacun raconte comment il a vécu les événements et certains ont été traumatisés par des faits bien plus graves qu’une balle traversant une fenêtre.

Nous avons recommencer à travailler aujourd’hui... Autant dire que personne n’a réellement travaillé. Nous avons eu une réunion de sécurité jusque 3h et les heures de travail sont limitées. Les policiers procèdent à des arrestations en masse, encore quelques courses-poursuites contre les pilleurs dans la Cité et des rumeurs de réarmement et de viols... Et le nombre de morts et de blessés recensé augmente au fil de la journée. Je ne veux pas être alarmiste, le calme semble être là... il nous faut juste le temps de digérer ».

La photo est de Julien Bongo