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Une vie, c’est plein de petites et de grandes expériences d’émancipation, d’expériences d’affranchissement à l’égard d’une autorité, d’une domination, d’une sujétion. Plein d’expériences où nous avons réalisé une puissance, où nous avons senti monter en nous un pouvoir de, un pouvoir sur, un pouvoir avec. Plein d’expériences où nous avons osé dire tout haut les choses qu’on devait taire, comme dans cette lettre écrite par un ancien esclave à son vieux maître.

C’est bien parce que le concept d’émancipation renvoie à l’idée d’expériences singulières que nous avons voulu dans ce numéro d’Antipodes présenter différents récits d’émancipation. A travers ces récits, il s’agit de donner à lire des histoires de vie, d’essayer de saisir quand, autour de quoi, et comment jaillissent ces expériences émancipatrices. L’idée était aussi de savoir un peu mieux comment les personnes rencontrées pensent ce concept d’émancipation.

Plutôt que de partir des définitions des dictionnaires, des philosophes ou des sociologues, il nous semblait en effet plus intéressant de partir, au moins dans un premier temps, de ces autres manières de penser l’émancipation. Bien sûr, les personnes rencontrées ne représentent pas, ni ne sont représentatives d’un groupe ou d’une population. Ce sont néanmoins des histoires qui nous apprennent des choses sur l’émancipation et les expériences émancipatrices.

Nous présentons également la retranscription d’une intervention et d’un échange que nous avons eu à ITECO avec le sociologue Guy Bajoit. Lors de cette rencontre, il nous a présenté le travail qu’il mène actuellement sur l’individu sujet de lui-même. Ce travail s’inscrit dans une réflexion plus large sur l’évolution du modèle culturel et sur ses traductions en termes idéologiques et existentiels. Guy Bajoit propose ainsi d’envisager, à la suite d’Henri Bergson, le concept d’émancipation personnelle à partir des notions de conscience, d’intuition, d’instinct et d’intelligence.

On retrouve aussi un article de Jean-Pierre Nossent intitulé L’émancipation, entre éducation permanente et aide sociale. Ce texte est issu d’un exposé de l’auteur dans le cadre de l’Université d’été du Centre interfacultaire de formation des enseignants, en août 2009. Jean-Pierre Nossent revient dans ce texte sur l’histoire de la question de l’émancipation par l’éducation et la culture, ainsi que sur l’émergence des notions de démocratie culturelle et d’éducation permanente en Belgique francophone avec ses filiations diverses. Dans sa contribution, il explicite également l’idée d’une émancipation pédagogique.

Ce numéro reprend enfin la présentation d’un outil d’éducation populaire proposé par l’équipe de Scop Le Pavé, coopérative d’éducation populaire française, permettant à des groupes en formation de relier leurs histoires individuelles et collectives de manière à éclairer leurs pratiques et postures d’engagement ou d’émancipation.