Evaluer le développement ?

Mise en ligne: 16 décembre 2010

La sens de l’évaluation du développement au centre d’une Assemblée générale d’ITECO, par Aline Guebels

Quand on lui demande de faire le point sur la question de l’évaluation au sein des ONG, Philippe De Leener, directeur d’InterMondes, met immédiatement les choses au clair : « Nous préférons ne pas parler directement d’évaluation mais de qualité des ONG. C’est peut-être un point de vue un peu décalé mais qui a l’avantage de nous transporter du côté du sens, et de nous éviter ainsi de tomber dans le travers des techniques d’évaluation ».

Et Marc Totté, coordinateur chargé de projets et d’études chez InterMondes, de compléter : « Le critère ‘qualité’ devient une pression de plus en plus forte des administrations. La note politique du ministre Michel fait très bien ressortir cette dimension. Et au Ministère des Affaires étrangères en France, l’on retrouve cette exigence de ne plus être seulement sur de la gestion axée sur les résultats, mais sur une démarche qualité qui est chargée de méthodes de gestion particulières. On mentionne également la recherche de la satisfaction des bénéficiaires.

De tout cela découle une grande interrogation : la qualité vient du monde des entreprises et la satisfaction est celle du client... D’où le risque de renforcer des logiques clientélistes. C’est donc une notion chargée d’enjeux et de risques. C’est pourquoi nous estimons nécessaire de revoir les paradigmes du développement ».

Mise en contexte

Le premier élément qui semble important à Philippe De Leener lors de toute évaluation : prendre en considération le contexte. Toujours préférer parler de contextes au pluriel, parce que chaque contexte est « un contexte vu de quelque part, par quelqu’un ». Considérer dans un premier temps les éléments de contextes chez nous, dans notre société belge ou européenne de manière plus large. Première caractéristique de notre contexte : la crise des repères et le soupçon – ou les soupçons – sur nos modèles de société.

L’économique est évidemment sous les feux de la rampe, encore plus depuis la crise financière : croissance, hyper-financiarisation du capitalisme, approfondissement des inégalités... posent de plus en plus question. Le système politique est lui aussi en crise, avec la fragmentation de la démocratie dite représentative et une fuite en avant de la démocratie participative, moins séduisante que l’on pourrait le croire. Et une observation interpellante : les exclus sont souvent les meilleurs alliés de ceux qui excluent. Qui vote pour les néolibéraux ? Les pauvres ! De même, nos institutions éducatives, avec une école régulièrement sur la sellette et des constructions familiales déstructurées et dysfonctionnantes.

Autre crise : celle du sujet. L’hyper-individualisme croît, tout est vu sous l’angle de la subjectivité, de l’opinion de chacun, de la satisfaction des gens. D’où une crise de la solidarité. En Belgique, c’est la solidarité institutionnelle, le système de sécurité sociale versus les assurances privées. Ce qui transforme le rapport au collectif.

Deuxième aspect de contexte chez nous : la néo-libéralisation des institutions. La pensée instrumentale monte en puissance. Cette pensée qui place les instruments et les procédures à l’avant plan de tout et aux dépens de la pensée critique, prospective qui met l’accent sur le sens. Cela concerne directement les ONG qui sont soumises aux cadres logiques et à toute la quincaillerie qui les accompagne. L’intérêt général, lui, se déplace. On va vers un paradoxe : les services publics rentrent dans une logique de management privé, une idéologie marchande, alors que les services marchands font croire qu’ils sont de plus en plus au service du public, à votre service !

Troisième remarque : il faut garder en tête que nous sommes tous à la fois victime et bourreau. Oui, on est critique de ce système-là. Mais on en est aussi partie prenante, l’on se trouve aussi du côté des oppresseurs, même si c’est bien souvent contre notre volonté. Quatrième caractéristique de notre contexte : le développement est notre fond de commerce finalement. Et qu’il soit durable ou terminable, l’on doute encore et toujours de sa potentielle réussite. Mais ce qu’il ne faut surtout pas oublier, c’est que le développement est un système d’expropriation de l’autre ou de sa différence. Parce que l’on a tendance à voir l’autre comme la projection d’un idéal de soi, comme ce que l’on n’est pas capable de devenir.

Les droits de l’homme, les questions de genre, sont précisément des domaines dans lesquels on se projette sur l’autre, on projette notre histoire, nos combats sociaux sur l’histoire des autres. Et nous trouvons automatiquement normal que ce qui a été bon pour nous le soit pour les autres... Pour terminer sur une note positive : chez nous, il règne une conscience environnementale transnationale.

L’altermondialisme, l’alter-consommation sont des éléments de plus en plus structurants dans nos sociétés. Et on commence à remettre en cause la culture néolibérale, la compétition, le consumérisme. On tente de rediscuter la démocratie. Et de nouveaux mouvements sociaux émergent qui veulent revoir la question de l’intérêt général.

Du côté de chez eux

Par ailleurs, il faut prendre en compte le contexte chez eux, là-bas, dans notre contexte de travail. Avec l’Afrique comme point de référence principal. Premier élément : l’explosion démographique. En 1950, on estimait qu’il y avait environ 250 millions d’Africains. Aujourd’hui, ils sont un milliard. Dans quarante ans, deux milliards. Ce rythme de multiplication démographique ne connaît pas d’équivalent dans l’histoire du monde, nous sommes donc dans l’inconnu total.

Ensuite, le contexte économique : l’Afrique est dans une économie spécialement rentière, et du côté de l’informel, l’on se trouve dans une situation de guerre des pauvres contre les pauvres. De plus, leurs héritages structurels politiques sont en décrochage par rapport à la mondialisation, ne tiennent pas face aux défis démographiques et économiques. L’Afrique est également dans un contexte d’oscillation paradoxale parce qu’elle passe de sociétés d’abondance à des sociétés de pénurie. Il y a soixante ans, les sociétés étaient organisées autour de l’abondance, vivaient dans l’abondance, pas de biens de consommation naturellement, mais dans une culture de l’abondance. Aujourd’hui, nous nous trouvons dans un univers où les gens raisonnent en matière de « on n’a pas ceci, il nous manque cela pour être bien ».

Enfin, l’Afrique connaît une crise de la subjectivité. Quand les gens disaient « je » à l’époque, ils disaient plus ou moins « nous ». Aujourd’hui, les choses sont beaucoup plus difficiles à interpréter et dans les villes, on a affaire à de nouveaux modèles, de nouvelles façons d’être soi-même, de se dire soi-même. L’individualisme est en train d’émerger, d’où une crise de la solidarité. Alors qu’en Afrique le problème de solidarité est le suivant : on passe d’une solidarité obligée, clanique, à une solidarité institutionnalisée. Bien loin donc d’une situation sociale de solidarité.

Se changer soi -même pour changer les autres

Autre thématique que Philippe De Leener veut éclaircir : la question du changement. Tout d’abord, « parler de changement de situation n’a de sens que si on parle de son changement à soi – nous qui intervenons chez les autres – et du changement des autres ». Ainsi transparaît une règle d’or : la meilleure façon de changer les autres, c’est de se changer soi-même. Parce que quand on se change soi-même, cela invite les autres à s’adapter, à bouger, à se décaler, à se déplacer... En tous cas, à faire quelque chose de la différence qu’on leur propose. Et peut-être même nous pousser nous aussi vers quelque chose auquel on n’aurait pas pensé. D’où l’importance de la présence de l’interaction dans le travail des ONG, présence nécessaire à un travail de qualité.

Dès lors, la question à se poser est : que changer chez soi pour déclencher quel changement chez les autres ? Il ne faut toutefois pas perdre de vue que lorsque l’on parle de changement, l’on parle de « s’empêcher de » et « s’obliger à ». Changer n’est donc pas facile, c’est prendre des risques. Risque de perdre ou de se faire mal. Alors, que sommes-nous prêts à perdre pour que ça change ?, à quoi renonçons-nous quand nous disons que nous voulons que ça change ?

Questions importantes que les ONG et les personnes avec qui elles travaillent doivent se poser. Cependant, un drame Nord-Sud s’exprime dans le changement. C’est que ce dernier est souvent lié à une projection de soi. L’on parle d’injonction paradoxale d’altérité. Par la manière dont nous agissons, nous disons souvent : « Vous êtes merveilleux parce que vous êtes différents de nous ». Mais, en même temps, l’on dit « dorénavant, devenez comme nous ». L’autre devient l’objet de réalisation de ce que l’on rêve de devenir. La démocratie en est un exemple on ne peut plus représentatif : on est en train de faire de grandes leçons de démocratie chez les autres alors que chez nous, la démocratie est en crise.

Tout le développement, c’est-à-dire tout notre champ de travail, est bercé par cette redoutable mélodie de dire : « Vous n’êtes pas comme nous ; vous n’êtes pas comme nous pensons que vous devriez être ; vous ne faites pas ce que et comme nous pensons que vous devriez faire ; vous ne savez pas ce que nous pensons que vous devriez savoir ; vous n’avez pas ce que nous pensons que vous devriez avoir ». Cela se conjugue dans tous nos domaines de travail –genre, démocratie, droits– avec des conséquences qu’il faut interroger. Trois questions se profilent alors comme incontournables : Qu’est-ce que nous rêvons que les autres deviennent dans notre travail ? Comment soumettons-nous (au sens de dominer) les autres à ce rêve qui est le nôtre ? Quel est notre rêve pour nous-mêmes – indépendamment des autres – et d’où nous vient ce rêve ?

Finalement, souvenons-nous que la culture du changement est véritablement une spécialité culturelle de l’Occident. « C’est notre truc à nous les Blancs, et c’est donc difficile à comprendre pour les autres ». Partenaires, vraiment ? Dans les projets de développement, l’on se désigne souvent partenaires. Pour Philippe De Leener : « on utilise ce terme de manière totalement abusive ! ».

Pourquoi ? Selon lui, un partenariat est établi si et seulement s’il répond à trois conditions. Premièrement, il faut des objectifs à atteindre communs aux deux partenaires. Mais quand on dit qu’on veut aller sauver les gens de la pauvreté, la pauvreté n’est que d’un côté. Et n’est donc un objectif qui ne concerne qu’un des partenaires. Ensuite, chaque partenaire a quelque chose à donner, même si ce sont des choses différentes. Et en corollaire, chaque partenaire a quelque chose à recevoir. Or, dans la pratique, on voit à quel point il est difficile de remplir ces trois conditions.

Comment évaluer un partenariat ?

Première étape : se demander si le partenariat est équilibré. Il ne sera symétrique que si chacun des partenaires a le sentiment de recevoir assez en regard de ce qu’il donne. Dans les travaux de recherche sur les organisations belges notamment, le sentiment général est celui de l’asymétrie.

Autre question : avons-nous affaire à un partenariat instrumental ou stratégique ? Il est instrumental si l’un des deux partenaires a le sentiment qu’il est utilisé comme un moyen pour atteindre des buts qui ne sont pas partagés. Le partenariat est par contre stratégique si les deux partenaires s’unissent pour réaliser ensemble un but commun. Il y a souvent double instrumentalisation.

Ultime question : « qu’attendons-nous vraiment de la différence que les autres nous proposent ? ». En clair : « Qu’est-ce qu’on fait pour découvrir et comprendre les différences que l’autre apporte ? » et « Quel usage fait-on de cette différence ».

Bien souvent, la différence est idéalisée. L’on pensera le tam tam comme forcément chouette ou le slow food forcément génial parce que c’est différent. Mais fait-on vraiment grand cas de cette différence ? Philippe De Leener préfère parler de « collaboration » ou même de « relation ». « Il faut se poser la question : on leur donne ceci à eux, et nous, que recevons-nous ? En réalité, on a non seulement du mal à savoir ce qu’ils nous apportent, mais c’est même pire : ils n’ont même pas l’intention de nous apporter quelque chose. Recevoir, c’est la situation normale dans beaucoup d’espaces culturels en Afrique ».

On est face à des populations animées par le désir de dépendance. Se mettre en relation de dépendance, c’est l’idéal type. Et dans ce contexte-là, parler de partenariat c’est d’entrée de jeu se mettre en porte-à-faux. « D’où la question : qu’est-ce qu’on fait chez les autres s’ils n’ont rien à nous apporter ? C’est pour eux ou c’est pour nous qu’on donne ? Quel est le sens de ce don, pour nous et pour eux ? ».

Évaluer l’évaluation

Tout ce qui précède met en exergue le rôle de l’évaluateur lui-même. Soit il est un agent qui perpétue un système qui a énormément de limites. Soit il développe une réflexivité, interpelle, se sert des conflits pour faire changer les choses, doute, remet en cause, essaye de faire sortir les gens de leur registre de certitude ici ou là-bas. Ce que l’on attend de l’évaluation – si on veut qu’elle soit réellement facteur de changement – c’est bien autre chose que ce qui se pratique actuellement.

En bref, cela implique le fait d’être beaucoup plus soucieux d’interpeller le contexte. Parce que la façon dont on problématise le contexte définit les priorités. Et être vigilant, par exemple, au fait que les résultats attendus aient bien été réalisés ou se demander si on est dans une logique d’efficacité ou d’efficience. Cela nécessite de beaucoup mieux connaître les contextes, de beaucoup mieux saisir la propension des choses. « Comme l’a étudié le philosophe et sinologue François Julien, les Chinois pensent les choses autrement. Ils ne planifient pas tout, n’essayent pas d’orchestrer, de programmer les choses à l’avance mais ont beaucoup plus une aptitude à utiliser la propension des choses, c’est-à-dire les rapports de pouvoir qui existent, pour sauter sur des opportunités pour manipuler – manipulation qui n’est pas définie de manière aussi négative que chez nous. Ils ont aussi pensé le « non-agir », c’est-à-dire pas le fait de ne rien faire mais la capacité de ne pas agir avec sa propre volonté. C’est partir avant tout de la volonté des autres pour accompagner quelque chose. En ce sens, le modèle philosophique du Chinois, c’est l’eau qui s’écoule et évite les rochers, les difficultés, mais qui finalement érode les montagnes et forme les paysages », explique Marc Totté. La finalité n’a donc pas été pensée ; on est dans le processus, les choses vont arriver, vont se faire qu’on le veuille ou non. Nous pourrions ainsi complètement renouveler les façons de voir et de faire de l’évaluation, mais aussi de l’identification. Entendez identifier avant tout si cela vaut le coup de continuer à s’impliquer dans ce contexte-là, vu les compétences qui existent, vu la puissance de la volonté de changement. Marc Totté conclut : « Il faudrait pouvoir se dire un peu plus fréquemment : ‘nous, on ne s’engage pas dans ces situations-là, cela n’en vaut pas la peine’. Alors qu’il y a toute une mécanique, un système qui conditionne les gens à rentrer en force, à faire les choses parce que l’on a besoin des financements, parce qu’on a besoin des partenaires du Sud, parce qu’il faut agir ».

La qualité en questions

Ainsi, évaluation et qualité se jaugent sous l’ordre de ce que l’on appelle les trois excellences :

  • Excellence technique : quoi que l’on fasse, qu’on le fasse bien, complètement et efficacement, que cela marche. Tant dans le domaine économique, de la santé, du genre...
  • Excellence politique : quand on travaille efficacement d’un point de vue technique, on travaille sur les re-fondations de la société et, en particulier, de nos propres sociétés. La technique sert la politique. Elles sont mêlées.
  • Excellence organisationnelle et fonctionnelle : les ONG doivent fonctionner aussi à l’intérieur, chez nous. C’est une condition essentielle pour être acteur chez les autres. La précarité dans laquelle des personnes travaillent dans certaines des ONG de nos sociétés ne s’observe pas chez les autres. Même chez eux, on n’oserait pas faire travailler les gens dans des conditions aussi scandaleuses. « Si on vend le fair trade chez les autres, on doit être fair social chez nous » estime Philippe De Leener.

Des clés pour la qualité

InterMondes propose d’ailleurs quelques clés pour construire cette qualité :

  • Quelle analyse des contextes charpentent nos engagements ? Cette analyse est-elle suffisamment considérée et retravaillée ou simplement empruntée ? Est-ce que c’est notre analyse de chez nous ou de là-bas ? Sommes-nous du genre catastrophistes, moralisateurs ? Ou plutôt du côté angélique, euphorique, on ne voit que le merveilleux ? Quelle est notre place dans notre contexte ? Est-ce que ce sont eux (les bailleurs de fonds) qui veulent ou nous qui voulons ?
  • Quelle théorie du changement là-bas sous-tend nos engagements ici ? Il faut avoir une explication de ce qui ne va pas chez nous pour produire des pistes de changements valables là-bas. Sommes-nous capables d’expliquer ce qui va pas et pourquoi ? Est-ce que c’est une théorie du changement qui vaut pour eux là-bas ? Ou qui s’applique aussi à nous ici ? Est-ce que c’est notre propre théorie ou une théorie héritée, copiée-collée ? Sur quelles croyances et valeurs fonde-t-on notre propre théorie du changement ? Et qui sert-elle ? Nous ? Eux ? Tous les partenaires ?
  • Dans quelle dynamique de soumission nos engagements se nouent-ils ? Soumission voulue, acceptée, ou stratégique ? Ou est-ce une soumission non-pensée, refoulée (à des institutions par exemple) ? Dans quelle entreprise de domination notre soumission sert-elle ? « Beaucoup d’ONG sont soumises, plus ou moins fort. Sans analyse clairvoyante et réaliste, nous ne sommes jamais loin de l’hypocrisie dissimulée ou de la perversion ordinaire ‘on dit oui, mais c’est pour faire ce qu’il nous plaît’ ».
  • Quel est notre rapport aux moyens ? En particulier à l’argent et aux outils ? Jusqu’à quel point sommes-nous dépendants de l’argent – des autres – et avec quelles conséquences ? Jusqu’à quel point sommes-nous prisonniers des outils des autres ? Pas uniquement les outils pour agir mais aussi les concepts, les idéologies. Dans nos environnements, où innove-t-on ? Jusqu’à quel point explore-t-on du nouveau ou de l’inédit ? Dans quels domaines et avec quels effets sur quoi et sur qui ? Dans quels domaines ne vit-on aucun changement, aucune expérimentation ? Pourquoi ? Comment investiguons-nous le non-changement (non-changement chez nous pas chez les autres) ? Pourquoi, par exemple, ne remettons-nous pas en cause toute l’idéologie du genre ? Ou des droits de l’homme ? Pourquoi ces domaines sont-ils comme intouchables ? N’oublions pas que les droits de l’homme, c’est une invention européenne, même française et américaine, d’une certaine culture judéo-chrétienne. Et l’idée même de penser qu’il puisse y avoir des universaux, c’est une invention de notre culture à nous, c’est un produit culturel. Le point de vue intéressant, ce n’est pas de dire s’il y a du bon ou du mauvais, c’est de mettre des questions sur les valeurs. Nos propres valeurs d’abord : Est-ce qu’elles sont vraiment compréhensibles pour les autres ? Est-ce qu’elles ne sont pas contradictoires ? Il faut mettre en débat des choses qui, dans un des mondes comme dans l’autre, paraissent être des certitudes.
  • Comment fait-on travailler les difficultés et, surtout, les conflits ? Particulièrement avec les partenaires parce que le premier instrument de changement dans toutes les sociétés du monde, et peut-être même le plus pertinent, c’est le conflit. Alors que, dans notre milieu, on tente d’éviter le conflit, on applique une stratégie d’enrobage du conflit, surtout avec les autres et surtout avec les Africains. Et en quoi le refus du conflit est-il handicapant pour les autres, ceux avec qui l’on travaille ?
  • Que faisons-nous pour amplifier la perspective du changement chez nous et pas seulement chez les autres ?
  • Dans quelle mesure prenons-nous assez de distance avec la culture du résultat ? Ne réduit-on pas notre résultat au résultat des autres ? Il faut différencier les résultats de nos partenaires et les nôtres pour évaluer notre travail. Les résultats de ceux qui sont en difficulté ne peuvent être comparés aux résultats de ceux qui viennent accompagner, appuyer ?
  • Dans quelle mesure privilégions-nous une culture du processus ouvert ? Et si on donnait plus d’importance au processus qu’au résultat ?