La bureaucratie retarde la lutte contre la pauvreté au Nicaragua

Mise en ligne: 13 mars 2008

Plus d’un an après son investiture, Daniel Ortega déçoit les ONG nicaraguayennes sur ce qui devrait être son point fort : le social, par José Adán Silva

Depuis son investiture en janvier 2007, le président Daniel Ortega a lancé plusieurs programmes destinés à venir en aide à ses compatriotes. Pour les ONG de développement, les programmes sociaux annoncés par le président nicaraguayen Daniel Ortega étaient porteurs d’espoir dans ce pays pauvre d’Amérique latine, mais la lutte contre la faim et la pauvreté accuse du retard, car une partie de l’aide est engouffrée par les lourdeurs bureaucratiques. Les initiatives comme Faim zéro, destinée à nourrir les familles pauvres des zones rurales, ou celles attribuant des prêts à bas taux aux familles pauvres, ainsi que les campagnes de lutte contre l’analphabétisme ou en faveur de la gratuité dans l’enseignement peinent à redresser la situation, selon plusieurs ONG. Les premiers résultats semblent pourtant impressionnants. Jusqu’ici, 12 mille familles rurales ont pu bénéficier du programme Faim zéro et près de 13 mille femmes ont obtenu des prêts à faible taux. Selon les estimations, quelque 100 mille adultes seraient déjà inscrits dans un programme d’alphabétisation et, grâce aux centres de santé, des médicaments ont été distribués gratuitement à environ 450 mille Nicaraguayens. L’ampleur des défis reste cependant énorme, rappellent les ONG, notamment en ce qui concerne les huit Objectifs du millénaire pour le développement décidés en 2000 par les Etats membres des Nations unies. Selon les données de l’ONU, 15% de la population nicaraguayenne vit dans l’extrême pauvreté, avec moins d’un dollar par jour. Le Nicaragua est aujourd’hui le deuxième pays le plus pauvre d’Amérique latine, derrière Haïti, avec 2,6 millions de ses 5,6 millions d’habitants qui disposent de moins de 2 dollars par jour pour vivre.

Le poids de l’Eglise

« Le pays ne parvient pas à endiguer la pauvreté et la hausse du Produit intérieur brut ne profite pas aux plus pauvres à cause des inégalités dans la répartition des richesses », explique Maria Rosa Renzi, conseillère du Fonds des Nations unies pour le développement. Pour Javier Meléndez, qui dirige l’Institut d’étude des stratégies et politiques publiques, une ONG de Managua, les programmes sociaux sont ralentis par les lourdeurs de la bureaucratie. « Environ 45% du budget des programmes de lutte contre la pauvreté sont consacrés aux salaires des fonctionnaires et à d’autres coûts administratifs. Et il y a peu d’information officielle sur la manière dont les 55% restant sont utilisés », dit-il. En ce qui concerne les Objectifs du millénaire pour le développement qui visent à promouvoir l’égalité des sexes, à réduire la mortalité infantile et à améliorer la santé maternelle, les différents acteurs de terrain rappellent également que la criminalisation de l’avortement en toutes circonstances et le poids de l’Eglise catholique sont des entraves au travail des acteurs sociaux. « Il n’y a aucun cours d’éducation sexuelle dans les écoles, aucune campagne concernant l’usage du préservatif et aucun programme de prévention en matière de sida, par exemple, parce que l’Eglise catholique n’aime pas qu’on aborde ces questions », explique le sociologue Oscar René Vargas.