La Terre est ronde comme un ballon

Mise en ligne: 15 mars 2007

Le sport serait-il universel ? Au Pérou, en Iran, en Suisse, le sport fait du bien, fait du mal. Un ballon cousu par une fillette pakistanaise rebondit sur les pelouses suisses. Portraits d’ici et d’ailleurs

Pérou

Benedicta, la balle au pied

D’après la Fédération internationale de football, Fifa, quarante millions de femmes pratiquent le football de manière officielle autour du monde, au sein des clubs et des associations. Si ce nombre devenait une tache sur le globe elle ne couvrirait que deux ou trois pays d’Europe, le continent où le plus de femmes jouent au football. Mais la Fifa ne connaît pas le village de Churubamba, dans les Andes péruviens, et Benedicta Mamani ne connaît rien aux statistiques. Elle ne sait pas lire. Benedicta Mamani a quarante ans et est la joueuse la plus expérimentée de l’équipe de football féminine de Churubamba, un village de 250 personnes, situé à cinq heures de route de Cusco. Il s’agit d’un village de maisons en paille, érigé à mi-chemin entre les montagnes enneigées et la vallée tempérée de Cusco, l’ancienne capitale de l’Empire des Incas.

Le paysage à Churubamba semble être une imitation grandeur nature d’un grand stade : les montagnes entourent une plaine verte, dans laquelle il n’existe pas de poste de police, ni d’église, même pas une croix, mais bien deux buts au bon milieu de la grande esplanade qui est à la fois place et terrain de foot. Soixante maisons en pisé et toits en chaume et une école où l’on apprend à compter et à lire en langue quechua. Le foot, langue universelle, est arrivé à Churubamba bien avant l’espagnol, les livres ou les médicaments. Dans certains endroits du monde, le capitalisme a encore quelques vieilles nouveautés à proposer.

Pendant les années nonante, le président Alberto Fujimori, sous prétexte de réduire les statistiques de la pauvreté des zones rurales du pays, a entrepris une campagne de stérilisation des femmes. Le programme est arrivé à Churubamba. Il n’est pas difficile d’imaginer ce que la stérilisation forcée a pu provoquer dans un village où les femmes sont élevées pour faire des enfants et les enfants sont élevés pour travailler la terre. Elles avaient du temps libre et le temps libre est à l’origine de tous les jeux. D’après le professeur du village, les femmes ont commencé à jouer tout simplement parce qu’elles avaient du temps devant elles. Mais il est difficile de vérifier cette explication.

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Iran

Vahid, une massue à la main

Vahid vit à Téhéran, la capitale de l’Iran. Ce jeune garçon pratique une discipline sportive plus que millénaire et désire devenir maître de lutte à la massue. De ce fait, il se rend presque t--------------------------------------------------------------------------------club de sport à la mode iranienne. A l’ouverture de la zurkhaneh, des cloches et des tambours annoncent le début du rituel et de l’entraînement. Les sportifs nouent des bandes de tissu rouge autour des hanches. Ils sont pieds nus, car l’espace octogonal d’une zurkhaneh est un lieu sacré dont on ne doit pas fouler le sol chaussures aux pieds. L’entraînement se pratique au moyen de grosses massues en bois qui peuvent peser jusqu’à 25 kilos. C’est ainsi que les guerriers se musclaient jadis pour vaincre plus facilement leurs ennemis à l’épée. Les massues de Vahid pèsent huit kilos et il ne s’en sert pas pour un combat à l’épée mais pour une compétition.

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Bourkina Faso

Le Tour à l’africaine

Le principe « les même règles pour tous » n’est pas valable partout. Prenons l’exemple du cyclisme : le Tour du Faso organisé en Afrique de l’Ouest est l’unique course cycliste où des Africains professionnels du vélo peuvent se faire connaître d’un large public. Dans les grandes courses cyclistes européennes, on ne trouve que des professionnels occidentaux. En Europe, personne ne prenait au sérieux le cyclisme africain. De ce fait, les seuls à courir le Tour du Faso étaient des cyclistes d’Afrique de l’Ouest, qui ne peuvent pas vivre de leur sport, et des amateurs européens. 90 cyclistes en provenance de huit pays africains ainsi que des petites équipes professionnelles européennes participent au Tour. La presse suisse a écrit : « Le Tour continue d’être un lieu qui laisse de la place à l’improvisation. Quand la route se mue soudain en un tas de gravier, la course s’interrompt brusquement. Les cyclistes fatigués se font tirer par des motards lorsque personne ne peut les voir. »

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Pakistan

Razia, un ballon à la main

Je m’appelle Razia Kubra et j’ai 13
ans. J’habite avec ma mère et mes trois soeurs dans un village proche de la ville de Sialkot au Pakistan. Depuis deux ans, je couds des ballons de foot. Un homme nous apporte les pièces du ballon à la maison. Nous devons assembler 32 morceaux à l’aide d’un fil synthétique. Il faut faire 690 points, puis le ballon est terminé. Si je travaille vite, j’arrive à coudre trois ballons en sept heures. Je gagne pour chaque ballon 15 roupies pakistanaises. Tous les jours, je rentre directement à la maison après l’école et me mets à coudre. J’ai souvent mal au dos et aux genoux parce que pour coudre, je dois coincer le ballon entre les genoux. J’ai parfois aussi des ampoules sur les mains ou des maux de tête.

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Egypte

Un spectateur sur trois est une femme

Le fait de voir à la télévision, lors des premières rencontres de la Coupe africaine de football, des images des femmes sur les gradins en a encouragé d’autres à s’y rendre. À tel point que lors des quarts de finale, certains journaux locaux ont estimé que plus d’un spectateur sur trois était une femme. En groupes ou accompagnées de proches ou de leur petit ami, les Égyptiennes prennent place le plus naturellement du monde au milieu des hordes de supporters déchaînés, criant à tue-tête Masr, Masr (Égypte en arabe) comme tous les autres. La présence importante de femmes ne traduit pas nécessairement un engouement de ces dernières pour le football, mais reflète le cours d’un mouvement plus vaste et profond d’émancipation du sexe dit faible au sein de la très conservatrice société égyptienne. L’universitaire et journaliste Chérine el-Habbak estime même que par leur soutien à l’équipe nationale, les Égyptiennes manifestent leur sentiment d’appartenance nationale. Jadis, le poids des traditions et des coutumes les en aurait empêchées. Les mentalités ont évolué. Loin de s’effacer, bien au contraire, le cadre religieux musulman sur lequel repose la société égyptienne a connu durant ces vingt dernières années une évolution importante dans la lecture du statut de la femme. Constatant que nombre de traditions machistes entraient en contradiction avec les principes de l’Islam, les femmes des milieux éduqués ont réussi à aménager un cadre moins défavorable à l’exercice de leurs libertés. Malgré les obstacles que représentent certains milieux traditionalistes ou religieux rétrogrades, des avancées ont eu lieu. C’est le cas par exemple en matière d’activité professionnelle des femmes mariées et de la place prise par les diplômées issues de l’université. Apparemment minimes vus de l’extérieur, ces arrangements avec l’orthodoxie religieuse influent beaucoup sur la vie quotidienne des Égyptiennes. En août 2005, dans son Rapport sur la situation sociale dans le Monde, les Nations unies plaçaient l’Égypte en tête des pays d’Afrique et du monde arabe en matière d’égalité hommes-femmes.

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Iran

Skier coûte cher

Développement signifie mouvement et c’est aussi valable pour notre tête. Mais souvent les préjugés nous empêchent d’agir. Pourtant, il peut être passionnant de connaître la vie des autres. Qui aurait imaginé que l’on puisse faire du ski dans un pays islamique du Proche-Orient. Dizin, un des grands domaines skiables iraniens situé à 90 minutes de Téhéran séduit particulièrement les jeunes iraniennes. Les règles vestimentaires très strictes pour les femmes n’y sont pas valables, pas plus que l’interdiction d’écouter de la musique pop en public. Les jeunes femmes font du ski en pantalon et en anorak, la musique est diffusée par les mêmes haut-parleurs que les prières de midi. Seul l’alcool est interdit. Le pays semble s’ouvrir. Mais seuls de rares privilégiés peuvent jouir de la liberté de Dizin, car faire du ski en Iran coûte cher.

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Maroc

Nawal, du sprint au plaisir

Nawal Moutawakil est la première femme arabe et africaine à remporter une médaille d’or aux Jeux Olympiques dans un sport individuel à Los Angeles en 1984 où elle remporta le 400m haies. Elle a aiguisé ses premières armes sur les pistes olympiques. Ce fut le temps de la sportive. Depuis, Nawal Moutawakil a changé de tenue. Du sprint, elle n’en fait plus. Sa spécialité est désormais le travail des coulisses. En 2005, elle a présidé la commission du Comité olympique chargée de désigner la ville qui va abriter les Jeux Olympiques en 2012. La course féminine de Casablanca « Courir pour le plaisir » qu’elle préside est une réussite, dont la renommée a dépassé les frontières.

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Suisse

Paulinho, la main dans le sac

Les stars du football issues des
bidonvilles des pays en développement donnent de l’impulsion au commerce du foot en Europe. Elles rêvent de réussite et d’argent. Le joueur de la relève brésilienne, Paulinho (23 ans) qui jouait chez les Young Boys, en Suisse, est l’un d’entre eux. En juin 2003, un scandale éclate : il vole sa carte de crédit à un coéquipier et prélève 3 mille euros sur son compte. Paulinho a été soupçonné, a avoué les faits, a remboursé l’argent. Mais il a perdu son contrat chez les Young Boys. Sans contrat de travail, son statut en Suisse est devenu précaire. Il a eu toutefois la chance de trouver un nouvel employeur au Regensburg en Bundesliga 2, en Allemagne.

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