Ce numéro d’Antipodes - Outils pédagogiques réunit des matériaux en provenance des réseaux européens actifs en matière d’éducation au développement et d’une expérience d’éducation populaire en Afrique
Un élève sur quatre ignore que le Congo a été une colonie belge et que les noirs d’Amérique sont les descendants d’esclaves ; dans l’enseignement professionnel, plus d’un sur deux. Seul un élève sur trois sait que le Mexique a été une colonie espagnole ou que le Brésil fut portugais. Moins d’un élève sur quatre comprend l’importance historique de la machine à vapeur dans la révolution industrielle. A peine un élève sur sept sait que l’URSS a subi les plus lourdes pertes humaines durant le Deuxième Guerre mondiale. Un sur trois croit que la Belgique figure parmi les quatre pays ayant eu le plus de victimes...
En quittant le cadre scolaire, on sait par ailleurs que plus de la moitié des Belges ne savent pas que l’abréviation ONG signifie organisation non-gouvernementale, de même que, hélas, la majorité de la population ne semble pas être favorable à l’augmentation de l’aide au développement.
Bien que ces résultats datent de 2010, il n’est pas improbable que ces données n’aient pas substantiellement changé. Au vu du manque flagrant d’informations et d’une sensibilisation insuffisante de la population, on s’apperçoit que la tâche de l’éducation au développement est considérable.
Depuis qu’on utilise la dénomination d’éducation au développement, au début des années quatre-vingt, les personnes actives dans le domaine se sont senties à l’étroit dans leur position d’interface et de relais entre les ONG de développement et le public et se sont mises à explorer de nouvelles voies. Celles-ci combinent principalement la critique de la notion de développement à des méthodes de formation empruntées à d’autres formes d’éducation d’adultes. Au point que certains vont jusqu’à mettre en question le dénomination même d’éducation pour le développement et lui préfèrent celle d’éducation à la citoyenneté mondiale ou d’éducation critique et émancipatrice. Comme le dit justement Julián Lozano à propos d’un récent congrès en Espagne, en prônant ce changement de dénomination la méthode utilisée semble être plus déterminante que l’objectif à atteindre.
Il est vrai que l’éducation au développement éprouve des difficultés à communiquer avec un public plus large que celui des associations. Et quand elle y arrive, elle ne transmet pas toujours un message univoque. Par ailleurs, face à la montée de la démagogie populiste et des nacionalismes qui menace les sociétés européennes, il est imaginable que ces tendances régressives seraient peut-être plus prononcées sans le travail constant des associations au sein des espaces de discussion publique. Si bien que la nécessaire professionalisation des ONG ne devrait jamais représenter l’abandon du contact de celles-ci avec la base sociale, qui donne sens au travail des ONG et à leur existence même.
Ce numéro d’Antipodes - Outils pédagogiques réunit des matériaux en provenance de deux sources principales : les réseaux européens actifs en matière d’éducation au développement et une expérience d’éducation populaire en Afrique de l’Ouest, l’académie Milawoé, qui a eu lieu récemment au Togo. Parmi les premiers, l’effort d’élaboration d’un nouveau récit fondé sur la critique de la notion de développement en est le contenu essentiel. Dans la seconde partie, les questions de méthodes et les manières de travailler avec les publics sont privilégiées.
Bonne lecture.