EDITO

Mise en ligne: 7 janvier 2021

Pendant des années, ils n’ont fait que penser l’un à l’autre, vivre l’un pour l’autre, rêver l’un de l’autre, plongés dans l’envoûtement de l’amour. Certains leur prédisaient une belle et riche vie ensemble. Puis advint, la pandémie qui a tout faussé. L’éducation et le numérique se sont trop vus, ont passé trop de temps ensemble, de manière trop précipitée et « trop tôt ».

Car, paradoxalement, les confinements à répétition engendreront, peut-être, une mise à distance de l’utilisation du numérique (le distanciel) dans l’éducation - et dans d’autres domaines de la vie - de façon plus effective que toutes les discussions et débats antérieurs. A l’intérieur de toutes les difficultés, des malheurs et des catastrophes humaines et sanitaires dus à la pandémie actuelle, il semblerait qu’il y ait une nouvelle relativement inespérée : la généralisation de l’utilisation des écrans et du télétravail ne sera pas facilement ni acceptée ni propagée, pas même par les groupes sociaux qui semblaient la défendre. Ou en tous cas, pas tout de suite, ça nous donne un peu de répit. Tout le monde s’accorde à dire que ce qui nous manque aujourd’hui c’est de nous tenir les mains, de nous serrer les uns contre les autres, de danser et faire la fête, d’être proches, de sentir ce qui est humain chez les humains. Nous promettons et nous tiendrons promesse : nous commencerons par tout cela après la pandémie.

Il ne s’agit évidemment pas d’un positionnement inutile « pour » ou « contre » la technique ou la technologie ou les outils numériques ; ils sont là, nous les utilisons déjà. De plus, à moins d’être franchement aveugles ou insensibles, on ne peut pas nier en bloc les apports qu’ils ont pu et qu’ils peuvent encore amener. Non, les questions qui se posent à nous sont d’une autre nature : par exemple, quand on dit qu’on ne veut pas vivre dans un monde de robots, ce n’est pas pour dire que nous appelons à exterminer les robots de la planète terre, mais plutôt de garder un recul critique par rapport aux pouvoirs accordés aux robots et d’avoir des réflexions collectives sur les questions éthiques liées à la robotique et à l’arrivée massive de nouvelles technologies. Ces questions se posent pour des robots de supermarchés comme pour des robots de « trading haute fréquence », ou encore d’autres qui changent les contextes dans les sociétés et les modes d’interaction entre humains. Et donc que devons-nous faire ? Peut-être que l’éducation populaire devrait s’accaparer de ce sujet pour avancer dans une réflexion critique autour de l’utilisation de ces outils, sans angélismes, ni blocages. Et également, s’approprier de ce qui pourrait étoffer les propositions pédagogiques, grâce à certains apports. En rappelant, à qui veut l’entendre, que faire le pas de côté n’est pas faire marche arrière et que penser par les effets et les conséquences pourrait nous aider à nous définir des guides « éthiques ». Car mettre la tête dans le sable – ne pas penser la technique et se laisser simplement guider par elle – pourrait engendrer des catastrophes à venir.

Le présent numéro se veut une première esquisse autour de ces questions en éducation populaire ou dans l’enseignement à partir du contexte actuel. Il comporte quelques propositions et lignes de fuite pour sortir de simplismes d’analyse.

En attendant de dépasser la pandémie, nous nous serrons toutes et tous métaphoriquement par les bras de la sororité et de la fraternité et nous nous promettons de continuer à lutter pour un Monde plus égalitaire et plus juste.

« Au zénith du citadin, il n’y a plus de soleil, mais la pendule du bureau. » Bernard Charbonneau

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