Un Salon de l’intelligence plurielle et collective à Bruxelles ? Allons voir..., par Tito Dupret
Mynd the step…
Talented Youth Network, TYN, a organisé fin octobre sur le site de Tour et taxis à Bruxelles son cinquième Salon de la jeunesse bruxelloise, Mynd, également qualifié de « Salon de l’intelligence plurielle et collective ». Il est difficile d’être mieux accueilli. Une bénévole me conduit depuis l’extérieur jusqu’au lieu d’exposition et m’explique qu’elle est élève dans une école toute proche participant à l’organisation de l’événement. Le nom du salon est un mot-valise anglophone associant my (pour « my study, my job, my energy, my solidarity ») et mind (esprit, raison).
L’espace est envahi par des associations et des services à la jeunesse. Le public scolaire, cosmopolite pour ne pas dire maghrébin, est surtout molenbeekois car il est du quartier. Le salon est d’un abord direct, efficace. C’est logique, les mots-clés du jour sont : ambition, entreprendre, compétences, croire en soi, déterminé. Et aussi : apprendre, connaissances, comprendre la société, concentré.
Une charte graphique omniprésente décline la couleur violette, qu’il faut ainsi associer à l’événement. Elle est sur les banderoles, les brochures, les panneaux, la scène du Tyn talk show, le site web. Plus curieusement, c’est aussi la couleur du voile islamique que portent les élèves, important personnel d’encadrement pour l’occasion.
Les salon est également l’opportunité d’un rendez-vous citoyen. Notamment par la mise en avant d’une nouvelle formation : « Cityzen, pour toutes les personnes de 20 à 25 ans, souhaitant s’approprier les enjeux de la société afin de déconstruire les discours de haine et de violence. L’occasion t’est donnée de partager ton expérience et ton opinion afin de sensibiliser un large public à ces questions de société ».
Parmi les animations, la neuropsychologue Yousra Laaroussi offre tous les quarts d’heure à une dizaine de personnes de mesurer sommairement leur profil cérébral dominant, et ainsi de déterminer s’ils sont d’une sensibilité plutôt artistique ou scientifique. Depuis cet endroit, assis en cercle et studieux, l’on entend les cris d’encouragement pour un mini-parcours sportif. Au tableau des victoires, trônent sur le podium dessiné au feutre : Mounir, Oussama et Ahmed.
Parmi les acteurs habituels tels Bruxelles-Formation, Infor-Jeunes et le Bureau International Jeunesse, apparaît MolenGeek, « Espace d’idéation & incubateur de startups tech à Molenbeek » où l’entrepreneur pourra « apprendre les langages informatiques afin de programmer son projet au travers de la coding school ». Art2Work, pour sa part, offre aux décrochés scolaires et chômeurs des missions de transition professionnelle dans le secteur culturel et événementiel. Un coaching complet est compris et interpelle avec le slogan « I am I want I can ».
La Starts academy de Gluon aide les 14-18 ans à développer des jeux de réalité virtuelle, des applis pour smartphones, des objets avec une imprimante 3D ou une découpeuse laser. Selon leur brochure, « L’intelligence artificielle est comme un cerveau numérique qui, par l’analyse de données, peut aider à prendre des décisions plus justes et contribuer à rendre le monde plus durable et plus sûr ».
À quelques pas, Ali Niaz présente les Ambassadeurs d’expression citoyenne qui organisent depuis 2017 des joutes oratoires. C’est un exercice ambitieux qui existe jusque dans les tournois de l’Académie royale de Belgique, dont un thème actuel est « L’intelligence artificielle : espoir ou menace ? ». Le principe est d’opposer deux personnes chargées de défendre chaque position devant un public. Dans le même esprit, Parlement Jeunesse Wallonie-Bruxelles en est à sa 23e édition : « Devenir député ou journaliste pendant cinq jours de débats passionnés et ouverts ! ».
Deux magazines sont présents au Mynd. « Chez Magma, les jeunes déconstruisent les stéréotypes et produisent de nouveaux récits sur la jeunesse. Leurs créations sont diffusées sur mag-ma.org » où l’on trouve la campagne « Je vote pour ! » sous la rubrique Convictions. Missaly magazine, quant à lui et de riche facture, tient son nom de l’arabe missal qui signifie exemple. Son objectif est d’inspirer les jeunes qui pensent n’avoir aucun avenir professionnel avec « des témoignages d’ambassadeurs bénévoles issus de l’immigration (avocats, pharmaciens, médecins, comptables, menuisiers, porteurs de projet de la fonction publique) ».
Parmi les participants, deux associations caritatives sont actives. L’une d’elle est Karama solidarity venue pour trouver des bénévoles en expliquant bien que ce nom a récemment remplacé Islamic Relief pour une question de communication. L’autre est Rissala charity, dont le site web renvoie directement à une page Facebook où l’on peut lire que « D’après Anas (qu’Allah l’agrée), le Prophète (paix et bénédictions d’Allâh sur lui) a dit : « Multipliez les prières sur moi le jour et la nuit du vendredi, celui qui prie sur moi une prière Allah en prie sur lui dix ».
Enfin, sur un plan strictement sanitaire, Plateforme prévention sida présente une table aussi colorée qu’achalandée et Praxis explique qu’elle accompagne non pas les victimes, mais les auteurs de violences au sein du couple et de la famille. Plus largement, BePax « sensibilise citoyens et décideurs aux conflits qui divisent les différentes populations établies en Belgique et amène ces mêmes citoyens et décideurs à devenir des acteurs de paix. » Ce travail prend la forme de conférences et de débats citoyens, d’une revue, de formations.
En somme, une journée très riche dans un espace convivial parce qu’à taille humaine. Le titre de ce texte, « Mynd the step… », signifie « Attention à la marche… » d’un escalier qu’il faut monter et non pas descendre. Cet événement, à l’instar fin novembre du salon du Service d’information sur les études et les professions, mériterait d’être renseigné dans toutes les écoles de Bruxelles et de s’étendre aux jours de la semaine afin d’y faire venir un maximum d’élèves du secondaire. En s’ouvrant largement, le salon accueillera ainsi toute la diversité bruxelloise et nouera davantage avec les valeurs de laïcité et de neutralité qui prévalent dans la capitale européenne.