Par Antonio de la Fuente
Le flux des messages en circulation dans nos sociétés est en accélération constante. Persuasifs, ces messages sont majoritairement issus de la publicité et vantent le plus couramment les bienfaits de la consommation. Dans ce carnaval d’éléments colorés, scintillants et riants, la place des messages de la presse associative et d’ONG semble être bien minime. Que peut opposer une poignée de feuilles de choux à la déferlante publicitaire faite d’immédiateté, de sensualité, d’humour et d’agressivité ? Dans ce bal, la presse associative fait figure de cendrillon en désespoir de miracle.
La force de la presse associative se trouve pourtant ailleurs. Dans son nombre, tout d’abord, qui est à la fois petit et grand. Petit en quantité de tirages et d’audiences mais grand en diversité. La forte densité du tissu associatif assure aux périodiques des associations une présence multiple et décentralisée. S’ils peinent à se faire entendre au centre de la place publique, ces périodiques se trouvent par contre bien représentés dans l’horizontalité des rapports sociaux, dans cet espace citoyen parallèle et intermédiaire à l’intimité familiale et à l’espace public créé par la communication de masse.
Dans l’identité même de la démarche associative ensuite. Les associations sont composées de personnes qui font volontairement la démarche de se mettre ensemble et de faire circuler informations et opinions les concernant. Comme le dit bien Jacques Meyers, rédacteur en chef de l’Agenda interculturel dans cette édition, cette dépendance vis-à-vis du bon vouloir des personnes engagées, souvent peu nombreuses, est source d’extrême fragilité pour la presse associative. Et pourtant, et paradoxalement, c’est aussi un puissant ciment sur lequel la presse associative prend racine. Ces journaux existent parce qu’il y a autour d’eux la volonté de personnes qui agissent pour qu’il en soit ainsi.
Oui, mais sans les deniers publics toute la presse associative s’écroulerait comme un château de cartes, ne manquera-t-on pas de nous rétorquer. C’est vrai. Comme des pans entiers de l’activité socio-économique, d’ailleurs, tout aussi subsidiés par les fonds publics : l’agriculture, les arts scéniques, l’aéronautique, la recherche médicale, l’enseignement…
Il y a dix ans, un rapport d’évaluation d’un ensemble de périodiques d’ONG consacrés à l’éducation au développement en Belgique francophone, dont des extraits sont reproduits pages 27 à 31 de cette édition, insistait sur le fait que ces journaux avaient intérêt à se démarquer du langage persuasif et à créer et à renforcer une démarche éducative. Cela passe, entre autres facteurs, par une connaissance accrue et un approfondissement du rapport qui lie ces journaux avec le public auquel ils se destinent. Ce rapport d’évaluation avait été pris avec des pincettes par l’un ou l’autre responsable d’association qui s’était senti quelque peu déstabilisé. A présent, lorsqu’une nouvelle démarche d’évaluation concernant ce même type de périodiques est sur la grille de départ, Antipodes a essayé de faire circuler la parole parmi ceux qui font les journaux des associations et ceux qui, autour de nous, les lisent ou ne les lisent pas. Bonne lecture, c’est bien le cas de le dire.