Luttes sociales en Iran

Mise en ligne: 5 mai 2020

Qu’en est-il de l’Iran et des Iraniens ? Comment la société civile est-elle organisée ? Existe-t-il des mouvements sociaux et comment fonctionnent-ils ? Nous le demandons à Anwar Mir Sattari, professeur de mathématiques, écologiste universel et militant de gauche, qui vit en exil en Belgique depuis 1986 mais qui suit toujours la situation de près et travaille à distance pour plus de démocratie dans son pays d’origine. Propos recueillis par Joris de Beer

Monsieur Mir Sattari, merci d’avoir accepté l’invitation pour cette interview. Tout d’abord, pouvez-vous nous expliquer votre parcours ?

Je voudrais vous remercier pour m’avoir invité. Je suis arrivé en Belgique en 1986. J’ai 66 ans. J’ai deux enfants. J’habite à Overijse. En Iran, je travaillais en tant que professeur de mathématiques mais j’ai été expulsé de mon travail parce que j’étais membre d’un parti politique de gauche. En Belgique, j’ai essayé de poursuivre mes études à l’ULB mais à cause de difficultés, je n’ai pas pu les continuer. Actuellement, je travaille en tant qu’indépendant. Je suis également membre du parti Ecolo. Par rapport à l’Iran, j’essaie de suivre de près la situation des droits de l’homme et la politique. Je suis militant du “mouvement républicain, démocrate et laïque iranien”. On essaie de lutter pour les droits de l’homme en Iran et on se positionne contre la politique du régime islamique, mais aussi contre l’ingérence américaine. On croit que c’est le peuple iranien qui doit écrire lui-même sa propre histoire.

Quelles étaient les conditions qui vous ont obligé à fuir ? 

Après la révolution (en 1979), le nouveau régime de Khomeini a progressivement commencé à réaliser une “révolution culturelle” : Changer le rapport aux femmes, fermer des universités et/ou remplacer les profs par des ayatollah ou des gens du Hezbollah, séparer les filles et garçons, etc. Ensuite, le régime a très vite commencé à licencier, arrêter et même tuer tous les gens qui luttaient pour la démocratie en Iran et qui critiquaient le régime. C’était tellement flagrant qu’on disait que l’université avait été transformée en mosquée et les prisons étaient devenu les universités. Surtout dans la prison d’Evin (prison renommée pour ses prisonniers politiques, située dans un quartier à Téhéran), il y avait beaucoup d’intellectuels, de professeurs, activistes, journalistes, étudiants, …c’est pour cela qu’on l’appelait "l’université" d’Evin. Moi-même j’ai été emprisonné sous le régime du Shah, ainsi que sous celui de Khomeini durant une journée. En fait, j’ai eu de la chance. Il n’y avait pas encore les moyens digitaux d’aujourd’hui, donc le contrôle n’était pas bien organisé. J’ai été arrêté parce que la police est venue chercher quelqu’un dans ma maison et ils m’ont arrêté parce qu’ils ne trouvaient pas l’autre personne. J’ai passé une nuit en prison et le lendemain, ils m’ont interrogé. J’ai prétendu être innocent, clamant ne pas être impliqué dans la politique. Ils m’ont libéré en me demandant de dénoncer l’autre personne qu’ils cherchaient. C’est là ou j’ai commencé à préparer mon départ. En 1986, je suis arrivé en Belgique.

Objectivement, malgré les sanctions internationales, il y a eu pas mal de progrès en Iran depuis l’installation du régime en 1979. L’indice de développement humain s’est nettement amélioré depuis lors. L’espérance de vie a augmenté de 54 ans en 1980 à 76 ans en 2018. Quelles sont les bonnes choses et où cela ne va-t-il pas ?

Le prix du pétrole a augmenté après l’installation du régime islamique en 1979, donc il y avait beaucoup d’argent dans la caisse d’État (ndlr : l’Iran est le deuxième exportateur de pétrole et de gaz au niveau mondial). Quand Khomeini s’est installé, il se positionnait très proche de la classe ouvrière. Tout le monde (techniciens, ingénieurs …) voulait travailler pour le peuple. L’infrastructure s’est beaucoup améliorée. Ils ont construit des routes, des égouts, réseaux d’eau, électricité, le réseau GSM, etc. C’est vrai qu’il y a eu un réel progrès économique et technique, mais ce n’est pas du tout le mérite du régime qui pouvait juste profiter des pétrodollars et de la volonté du peuple au début pour s’aligner aux progrès technologiques mondiaux. Le niveau de scolarité est élevé, mais on n’apprend pas à réfléchir, surtout pas de manière critique. Beaucoup d’intellectuels sont partis en diaspora. Peut-être qu’il y a un peu de marge de manœuvre maintenant, on peut parler de certaines choses ou avoir une approche critique mais c’est toujours dangereux, surtout si on se met à s’organiser.

Il n’y a pas de démocratie en Iran. Il n’y a pas d’opposition politique, ni de vraie société civile, ni de liberté de presse, ni de liberté d’expression, ni de liberté de religion ou vie culturelle. En Iran, il y a différentes religions, mais le chiisme est discriminé de manière positive par rapport aux autres. Par exemple, on ne pourrait jamais avoir un poste de pouvoir important au gouvernement ou dans l’armée si on n’est pas chiite.
Il y a même une vraie dictature de la religion. Les gens ont peur des voisins, peur d’être dénoncés, par exemple de ne pas pratiquer correctement la religion. Et toute personne qui se positionne ouvertement contre le régime ou qui se met à organiser une résistance risque sa vie. Et la répression a parfois pris des formes horrifiques. Auparavant, ils venaient même apporter un gâteau à des parents pour leur annoncer par exemple que leur fils avait été fusillé par les gardiens de la révolution, en voulant leur montrer qu’ils devaient être contents de son exécution parce qu’il était communiste et ne connaissait pas Dieu. Avant de tuer des femmes communistes, elles étaient violées pour leur “rendre service” parce qu’il serait préférable d’aller dans l’autre monde en ayant perdu la virginité. Dans les prisons, les conditions étaient invivables. Il y avait 70 personnes dans une petite chambre de par exemple 3 sur 4 mètres. Il n’y avait même pas la place pour s’asseoir. Tout le monde devait rester debout et il fallait dormir chacun son tour. Jusqu’à maintenant, beaucoup de gens n’ont pas pu récupérer le cadavre de leur proche. Parfois, ils demandent de l’argent pour cette restitution. La situation s’est peut-être améliorée légèrement, mais aujourd’hui les gens qui se mobilisent contre l’intérêt du régime ne sont toujours pas à l’abri d’un arrêt, de fausses accusations, de coups de fouet ou même d’être tués.

D’ailleurs, aujourd’hui l’économie va mal. Il y a un énorme problème de corruption et de clientélisme. Il y a très peu de travail adéquat, même pour les universitaires. Beaucoup de jeunes diplômés n’ont pas de travail et sont obligés de vivre aux dépens de leurs parents ou se débrouillent à combiner différents petits boulots pour s’en sortir à la fin du mois. Pour gagner bien sa vie, il faut être proche du régime. Beaucoup de services ont été privatisés et mis sous contrôle de personnes proches des ayatollah qui s’enrichissent énormément sur le dos des ouvriers, qui ne perçoivent parfois pas de salaire pendant des mois alors que des milliards de dollars partent à l’étranger. Au niveau des relations internationales, c’est d’ailleurs une situation hypocrite. D’un côté le Canada, par exemple, se montre critique envers le régime iranien, mais d’un autre côté, des milliards de dollars iraniens venant des riches proches du régime partent au Canada et même aux Etats-Unis.

Mais l’actuel président, Rohani, n’a-t-il pas un profil de réformateur, plus moderne que son prédécesseur Ahmadinejad ?

Dans le temps, beaucoup de gens ont voté pour Rohani. Maintenant, il y en a beaucoup qui renoncent à cela ouvertement. Qui regrettent. Rohani a fait beaucoup de promesses par rapport au soutien aux ouvriers, à la position de la femme etc. mais c’est de la propagande pure et dure. Il n’est pas du tout réformateur. Il est depuis 40 ans dans le système et il ne s’est jamais positionné contre Khamenei. D’ailleurs, tout le pouvoir (politique, législatif, judiciaire, exécutif et militaire) est du côté des ayatollah. Le président n’a pas un pouvoir réel en Iran. Ni Rohani, ni ses prédécesseurs, ni son successeur. Bientôt, il y aura des élections, mais il n’y a pas de vrai choix. Il y a des nuances entre les candidats, mais ce sont toutes des personnes du système. C’est pour cela que l’opposition fait appel au boycott des prochaines élections.

Comment est organisée la lutte sociale en Iran ? Qu’en est-il de la société civile ? L’opposition politique ? Les mouvements sociaux ? Le réseau des ONG ?

La majorité de tentatives d’organisation de l’opposition politique viennent de l’extérieur du pays. Mais l’opposition est divisée. Il y a les royalistes qui veulent le retour du fils du Shah, puis les différents mouvements de gauche dont je fais partie, mais aussi les “moudjahedin” qui luttent pour une autre interprétation de l’islam. A l’intérieur, il y a évidemment plein de gens qui sont contre le régime, mais s’organiser est très dangereux. Je suis d’ailleurs persuadé que même aujourd’hui toute ma communication (téléphone, internet, télégramme, facebook), surtout avec des gens en Iran, est contrôlée.

Cela n’a pas empêché que les gens résistent et luttent depuis toujours, mais on ne peut pas parler de lutte organisée à l’intérieur du pays. Depuis l’arrivée du régime, toute tentative de la société civile pour s’organiser contre son intérêt est stoppée à 100%. Il y a des syndicats mais ce sont des organisations liées au régime. A un moment donné, les pays Européens et les Nations Unies voulaient encourager la société civile à développer des ONG en Iran. Par conséquent, le Régime a créé des ONG. Donc oui, il y a des ONG mais elles sont dépendantes du régime. Ces ONG étatiques touchent même parfois des subsides internationaux. La société civile essaie de s’organiser clandestinement, par télégramme, par sms, par internet etc., mais quand il y a des émeutes, le régime coupe l’accès à internet. De vraies organisations indépendantes, cela n’existe donc pas en Iran. Le régime ne tolère aucune publicité négative sur la situation dans le pays.

Mais cela n’empêche pas que les gens se mobilisent. La majorité des manifestations commencent pour une raison particulière mais se transforment très vite en manifestations contre le régime. A chaque fois, le gouvernement a réagi de manière très répressive en arrêtant ou même tuant les impliqués. Récemment, par exemple fin 2017-début 2018, il y avait des manifestations contre la corruption et la situation économique un peu partout dans le pays et on croyait même que le régime allait chuter. Dans la manifestion contre l’augmentation du prix de carburant à 300% de novembre 2019, menée dans plus de 100 villes, on parle de 1500 morts et 7000 personnes arrêtées. Pendant cette manifestation, les forces armées ont tué pour tuer. Avec des armes de guerre, ils ont tiré de près sur le coeur et la tête des gens. Ou encore des manifestations des ouvriers de l’industrie de canne à sucre dans le Sud du pays où ils ont condamné des leaders à des coups de fouet. Même des ouvriers qui revendiquent leur salaire devant le gouverneur de province par exemple risquent d’être arrêtés, toujours avec le même argument qu’on met en danger la sécurité nationale.

Qu’en est-il de la position de la femme en Iran ?

La situation de la femme est catastrophique. Le régime des Ayatollah a changé des lois et rajouté des paragraphes qui indiquent qu’une loi ne peut jamais être contre les principes de l’islam ou la sharia. Par exemple, avant il y avait toute une série de lois sur la famille et notamment la position de la femme. La polygamie était interdite et la femme avait beaucoup plus de liberté. Tout cela a été supprimé et changé par le régime. Maintenant, une femme ne peut pas voyager ou avoir un passeport sans autorisation de son homme, elle est désavantagée à l’héritage (un garçon reçoit deux fois plus que la fille), elle est obligée de porter le voile, etc. Bref c’est le dictat de la loi islamique.

Depuis 79, il y a eu des femmes qui se sont manifestées contre la position de la femme et le voile obligatoire. Il y a beaucoup de femmes en prison à cause de leur positionnement. Un exemple récent et connu en Iran est Nasrin Sotoudeh, une avocate et activiste pour le droit des femmes en Iran, qui a gagné le prix Sakharov pour la liberté d’expression (remis par l’UE en 2012) est condamnée à une peine de 33 ans et 148 coups de fouet en 2019 pour soi-disant plusieurs délits, mais en fait parce qu’elle se positionnait ouvertement contre l’obligation du port du voile et pour une meilleure situation de la femme en Iran.

Mais la lutte continue. Cette année, il y aura par exemple une action autour de la journée internationale de la femme (8 mars) organisée à travers facebook où des femmes vont jeter leur voile dans l’espace public.

Parfois, on lit qu’il y a un énorme problème de drogue et même de consommation d’alcool en Iran. Peux-tu nous en parler ?

Selon les statistiques, 25% des jeunes prennent de la drogue. Surtout de l’opium et de l’héroïne qui viennent de l’Afghanistan. Les jeunes n’ont rien à faire, ils s’ennuient et cherchent l’escapade dans la drogue. C’est d’ailleurs le régime même qui importe la drogue. Par exemple on dit que le Général Soleimani était impliqué dans la mafia du trafic de drogue. Il faut savoir que l’Iran reçoit des fonds internationaux pour lutter contre la drogue à la frontière avec l’Afghanistan (le premier producteur mondial d’opium et d’héroine, +/- 90% de la production). Ce sont ces mêmes gens qui sont censés lutter contre la drogue qui organisent le trafic jusqu’en Europe. Et c’est le consommateur qui est puni. Avant, jusqu’à il y a deux ans, on risquait l’exécution en possession de drogue. Maintenant, c’est moins controlé mais on risque toujours la prison pendant longtemps en tant que consommateur. Fait divers, on dit que même le guide suprême consomme de l’opium.

L’alcool est officiellement interdit en Iran, mais la réalité est qu’il y a beaucoup d’Iraniens qui boivent de l’alcool, mais de manière clandestine. Dans les années 80, on risquait 80 coups de fouet pour boire de l’alcool dans l’espace public. Après un certain temps, le contrôle est devenu moins strict car ils ont constaté que cela ne change rien. Aujourd’hui, beaucoup de gens ont leur propre installation de fabrique d’alcool à la maison. Tout est disponible, de la bière, du vin, du whisky. Il y a même des services de livraison à domicile. Si tu veux organiser une fête et que tu as besoin d’alcool, tu es fourni dans la demi heure.

J’ai lu aussi dans un rapport qu’en Iran, le problème du sida est non négligeable

Le sida est tabou en Iran. On ne veut pas en entendre parler parce que c’est une maladie sexuellement transmissible et le sida est plus fréquent chez les homosexuels, alors que les rapports homosexuels sont interdits en Iran. Le régime minimise le problème. Les statistiques officielles de prévalence HIV sont très probablement une sous-estimation de la situation. Et la lutte contre le sida est donc aussi taboue car le problème n’existe pas officiellement. Il y a par exemple deux frères médecins qui luttaient contre le sida et qui sont toujours emprisonnés.

Qu’en est-il par rapport à la préservation des droits des minorités en Iran ?

Les groupes ethniques minoritaires (Kurdes, Azeris, Arabes, Baloutchis …) sont réprimés. Ils n’ont pas la liberté de vivre leur culture. A Téhéran, il n’y a même pas de mosquée sunnite alors que 9% des Iraniens sont sunnites. Aussi, les minorités n’ont pas le droit de parler leur langue maternelle à l’école ou au travail. Il n’y a pas de cours dans leur langue. Tous les cours officiels sont en farsi. Il y a des manifestations et de la résistance, mais historiquement, cela a toujours été réprimé. C’est Qassem Soleimani par exemple qui a donné l’ordre de tuer les leaders de la résistance kurde à Berlin (assasinat du restaurant de Mykonos, trois leaders kurdes et leur traducteur tués en 1972). Dans la capitale de la province du Kurdistan, à Sanandaj, il y a régulièrement des manifestations, fermetures de commerces, etc. Peut-être que la résistance kurde est plus ou moins organisée, aussi à l’intérieur du pays, mais les autres minorités sont très peu organisées. En effet, le régime ne le leur permet pas. Pour s’organiser, il faut avoir des médias (radio, télévision …) mais tout est censuré. Il y a beaucoup de chaînes télévisées, radio, gazette, etc. dans le pays mais ce n’est que de la propagande du régime. Toute organisation de résistance vient de l’extérieur du pays.

Pour revenir à la situation économique, il y a l’impact des sanctions économiques en réponse au plan nucléaire. Pourtant, certaines voix disent que l’Iran n’a jamais eu la capacité ni l’ambition de développer une arme nucléaire. Qu’est-ce que tu en penses ?

Moi, je pense que le régime iranien voulait faire le programme de l’énergie nucléaire jusqu’à la bombe atomique. Ce programme existait déjà à l’époque du Shah. Le régime l’a repris après la guerre Iran-Irak et voulait développer une bombe atomique, surtout pour faire face à la menace israëlienne, mais aussi en général, pour être un état fort au niveau militaire. Parfois, on parlait de la “bombe islamique” en faisant référence à l’épée islamique. Pendant des années, l’Europe a fait beaucoup de pression diplomatique pour que l’Iran ne développe pas ce programme et ils ont encouragé la négociation plutôt que le conflit. Mais l’Iran a continué à développer ce programme de manière clandestine. A un moment donné, la communauté internationale a décidé de boycotter l’Iran. Et je pense que le boycott a eu son effet. D’ailleurs, en Iran, l’énergie nucléaire n’est pas nécessaire. On a beaucoup de gaz et de pétrole et pour l’instant on brûle beaucoup de gaz qu’on pourrait aussi utiliser en tant que source énergétique si on avait l’infrastructure. Aussi, il y a énormément de potentiel pour l’énergie solaire et éolienne. Le programme de développement de la bombe atomique a coûté énormément d’argent au pays et ce n’est pas dans l’intérêt de la population, c’est uniquement pour se positionner au niveau géostratégique.

Et c’est la même chose par rapport au programme militaire de l’Iran. Depuis la Révolution islamique, le régime cherche à exercer son influence en supportant divers groupes militaires dans différents pays au Proche Orient (Syrie, Irak, Liban, Yémen) essentiellement pour deux raisons :
D’abord, défendre et promovoir le chiisme.
Deuxième raison : lutter contre l’influence des Américains.
La situation internationale géopolitique est d’ailleurs hypocrite. Par exemple, le régime iranien intervient en Syrie, en Iraq et au Yémen et contribue donc à l’instabilité du Proche Orient. Et cela arrange les pays occidentaux exportateurs d’armes. Par exemple, les Etats-Unis qui vendent énormément à l’Arabie Saoudite. Aussi, cela justifie la présence de ses bases militaires dans le Proche Orient. Bien sûr, on pourrait aussi dire que les USA n’ont rien à voir au Proche Orient, mais moi en tant qu’Iranien je préfère balayer devant ma propre porte. Aussi, la machine militaire coûte énormément d’argent et le régime aurait pu utiliser cet argent à l’intérieur du pays au profit de la population qui, de manière générale, s’en fout du programme militaire.

Récemment, les Américains ont tué le Général Qassem Soleimani. A ses funérailles, il y avait beaucoup de gens. Les gens l’aimaient-ils ? 

Lors des dernières années, le régime a fait beaucoup de propagande pour le présenter en tant que héros et leader charismatique. Il y a des rumeurs qui disent que le régime était en train de le préparer en tant que futur président, car la population ne voulait plus aller voter. Oui, on sait que la propagande marche bien, mais personnellement je ne pense pas que la population l’aime vraiment. En tout cas, moi-même je n’en vois pas la raison. Aussi, les foules pendant son enterrement étaient partiellement orchestrées à mon avis. Il faut souligner qu’il a été l’un des commandants d’assassinats de centaines de dirigeants et de personnalités d’opposition en Europe.
Il y a les élections dans quelques mois. Comment vois-tu le futur ?

Comme je l’ai déjà dit, l’opposition fait appel au boycott, parce que tous les candidats pour devenir président parlementaire sont du côté du régime. Typiquement, avant les élections le régime fera une campagne de propagande en exagérant les menaces venant de l’ennemi extérieur (USA, Israël, Arabie Saoudite …) et en salissant la réputation des oppositions. On essaie avec l’opposition de faire contrepoids mais c’est difficile parce qu’à l’intérieur du pays tous les médias sont contrôlés et censurés.

Mais je suis avant tout un homme optimiste et positif ; je crois en la lutte de la population malgré la situation. Les manifestations deviennent de plus en plus récurrentes. Les gens s’habituent à manifester. Ils n’ont plus peur comme avant, malgré les risques. J’ai donc de l’espoir que le changement viendra bientôt. L’Iran est un énorme pays avec une magnifique richesse culturelle et naturelle. Il y a un très grand potentiel pour le tourisme. Le destin du pays et du peuple iranien me tiendra toujours énormément à coeur et je continue à m’investir pour un futur démocratique et écologique de mon pays et de mon peuple.