Des critères et des indicateurs

Mise en ligne: 22 septembre 2015

Faisabilité, continuité, expérience, réseaux, démarche globale, renforcement…, par Miguel Argibay

Il nous faut bien admettre que l’on manque de critères clairs pour financer et pour évaluer les actions d’éducation au développement. Et cela malgré le consensus sur le fait que l’éducation au développement est un pilier de la solidarité entre les peuples et qu’il est dès lors nécessaire de former les citoyens à une citoyenneté globale. Des critères clairs de formulation, suivi et évaluation des projets d’éducation au développement n’ont pas encore été établis, malgré l’importance d’aller vers une transformation des connaissances, le démontage des préjugés et la construction d’attitudes solidaires parmi les citoyens des pays développés, malgré la nécessité d’obtenir des renforts sociaux pour la coopération.

Nous faisons ici un essai de description des critères les plus appropriés pour appuyer et évaluer les actions d’éducation au développement aussi bien dans l’éducation formelle que dans la formation d’adultes. Nous suggérons qu’un projet d’éducation au développement doit remplir les exigences suivantes :

Avoir quelques-uns de ces objectifs généraux :

  • Promouvoir des valeurs et des attitudes solidaires dans la communauté vers laquelle il est dirigé.
  • Incorporer la démarche globale de l’éducation au développement. C’est-à-dire présenter quelques-unes des caractéristiques suivantes :
    1. Montrer l’interdépendance des phénomènes du développement.
    2. Proposer des clés d’analyse et d’interprétation de ces phénomènes.
    3. Permettre de démonter des stéréotypes sur le Nord et le Sud.
    4. Proposer des formes d’engagement et de coopération solidaires.

Dans l’éducation formelle, le projet doit s’adresser à quelques-uns de ces groupes cibles : enseignants, étudiants, communauté éducative dans un sens large (associations de parents, pouvoirs organisateurs, autorités communales, syndicats d’enseignants…).

Dans la formation d’adultes : formateurs de bénévoles, associations de jeunes, syndicats, éducateurs, membres d’ONG et de mouvements sociaux, associations de migrants, responsables et personnel des institutions.

Le projet doit traiter de quelques-unes de ces thématiques : développement, coopération, droits de l’homme, pauvreté, faim, conflits, femmes et développement, exploitation infantile, migrations, déplacés, réfugiés, asile, commerce équitable, colonialisme, néocolonialisme, mondialisation…

Pour être évalué favorablement, le projet doit être formulé selon les critères d’évaluation suivants :

a) Adéquation méthodologique et documentaire par rapport au contexte et aux groupes cibles
b) cohérence entre les objectifs et les ressources disponibles

Critères et indicateurs

1. Faisabilité : Diagnostic préalable, planification du processus, cohérence entre les résultats escomptés, le groupe cible choisi, les ressources disponibles

2. Continuité : Durabilité à moyen et long terme

3. Expérience : Trajectoire de l’ONG, qualité et impact de ses travaux, capacité à travailler en réseau

4. Réseaux : Etre ou provoquer une plate-forme d’action, impliquer la participation d’acteurs et bénéficiaires

5. Démarche globale : Pluri-causalité des phénomènes de développement, liens entre le local et le global

6. Renforcement : Formation du groupe bénéficiaire en matière de développement, déconstruction de préjugés, proposition de stratégies et d’actions alternatives

7. Evaluation : Capacité d’évaluer les actions par rapport au degré d’approximation qualitative et quantitative aux résultats attendus.

De même, on évaluera positivement le projet aui présente les éléments suivants :

1. Que les différents composants deviennent des partenaires au sein du projet, qu’ils s’associent à l’action

2. La formulation de critères pédagogiques suivant des méthodes appropriées aux caractéristiques du groupe objectif

3. Des impulsions à l’innovation pédagogique, au travers de la documentation, la méthodologie, les ressources

4. L’offre de formation et d’appui aux groupes cibles

5. Le contact avec des groupes associatifs, des ONG, des syndicats est prioritaire

6. Une conception à moyen et à long terme

7. Une prise en compte des questions liés au genre, à l’interculturalité, à l’environnement, et aux droits de l’homme

8. Des espaces de participation pour d’autres associations ou collectifs sociaux

9. Des capacités de se mettre en rapport avec le Sud à travers des échanges, des jumelages…

10. L’explicitation de critères d’évaluation qualitative et quantitative

Par contre, on évaluera le projet négativement si :

1. Ne promeut pas des valeurs de coopération et d’engagement solidaire sur le plan local et international
2. N’est pas cohérent
3. Ne s’adapte pas au contexte
4. Renforce des préjugés ou des stéréotypes de genre ou culturels
5. Ne dispose pas de critères pédagogiques, comme, par exemple, l’adaptatation en termes thématiques et instrumentaux à l’âge et aux autres caractéristiques des groupes cibles
6. Ne s’ouvre pas à la participation du groupe cible
7. Propose uniquement des activités ponctuelles et de peu d’intérêt pour le groupe cible
8. Vise uniquement le court terme
9. Ses critères d’évaluation sont purement quantitatifs.

Bien que ces critères ne sont pas les seuls, nous pensons qu’ils sont déterminants. Il faut remarquer que tous les projets présentent de l’énoncé à l’exécution des aspects positifs et négatifs. Il est dès lors très important de déceler lesquels parmi ces derniers répondent à des erreurs de conception et sont inacceptables, comme le manque de tout critère pédagogique, et lesquels résultent d’aspects moins significatifs et facilement modifiables, comme le manque de participation.