Pour Partenaire libéral, l’ONG du PRL, l’amélioration des conditions de vie
des pays du Sud passe par le soutien des activités économiques productives.
Afin d’assurer leur viabilité dans le long terme, elle cherche des interlocuteurs sérieux et manifestant la volonté d’entreprendre, par Andrés Patuelli
« Pour moi, le partenariat, c’est un soutien à des initiatives du Sud, avec des gens sérieux ». Les caractéristiques du partenaire idéal, soulignées par Arthur Bodson, président de Partenaire libéral pour le développement, l’ONG du PRL, semblent correspondre à celles de tout bon entrepreneur : volonté d’agir, compétence technique, connaissance des besoins des communautés, capacité de mettre en place une activité productive soutenable dans le temps, et surtout rigueur et responsabilité dans la gestion des ressources accordées. Pour Partenaire, l’amélioration des conditions de vie des populations passe par leur indépendance économique ; ses projets se centrent donc sur la stimulation et le soutien des activités productives.
Arthur Bodson est conscient qu’il y a bien d’autres domaines où la coopération est nécessaire ; cet ex-recteur de l’Université de Liège préside l’Agence universitaire de la francophonie. Mais il fallait faire un choix : « trouver la spécificité libérale, définir notre créneau, parce qu’il existe trop de dispersion dans la coopération au développement : il y a au moins quatre-vingt ONG francophones ; cette situation ne va pas durer longtemps » . C’est justement pour faire face aux changements dans le monde de la coopération internationale, mais également pour être plus cohérent avec la ligne politique du parti que, lors d’un cONGrès doctrinal en 1996, le PRL décida de regrouper toutes ses forces actives dans le domaine de la coopération. Ainsi, Coopération et progrès et Solidarité libérale internationale s’unirent pour former, en avril 1998, une seule et même ONG : Partenaire libéral pour le développement. L’autre ONG libérale, Delipro, n’a pas voulu rejoindre les autres, préférant poursuivre ses activités sous la forme d’une ONG indépendante.
Pour son fonctionnement, l’unique représentante de la mouvance libérale est réduite au nécessaire : sans compter les chargés de mission à l’étranger, Partenaire est pour l’essentiel composé de son président et de deux vice-présidents, qui se rencontrent tous les mois, d’un Conseil d’administration, qui se réunit deux ou trois fois par an, et d’une personne chargée de la gestion administrative.
Le PRL décida également de réduire les zones d’action de son ONG, en se concentrant sur la région des grands lacs africains (République démocratique du Congo, Rwanda et Burundi) ainsi que sur la Mauritanie, le bassin méditerranéen (Maroc, Tunisie et Palestine) et la zone des Andes (Bolivie, Équateur et Pérou). Arthur Bodson estime toutefois qu’il vaudrait mieux se concentrer davantage encore : tout logiquement, dans la région des grands lacs, pour des raisons historiques et pratiques (la même langue et l’existence de nombreux contacts, commerciaux, diplomatiques et éducatifs), quitte à tout recommencer à zéro. Et il va maintenir sa présence dans la zone andine, « parce qu’on a vu que ça marche » .
Pour Partenaire, qu’est-ce qui fait qu’un projet marche ? Son Président cite comme de bons exemples les expériences de l’Équateur et de la Bolivie : « Il s’agit de projets que nous avons réalisés avec les communautés, lesquelles ont démontré leur capacité de se prendre en main, ce qui assure que l’action soit soutenable ; dans les deux cas, nos partenaires sont sérieux ».
Le projet en Équateur, à réaliser au cours de la période 2001- 2002, avec l’ONG locale IEDECA, vise à améliorer les conditions de vie de 51 communautés de petits propriétaires paysans, au nord-est de Quito. Dans cette région au relief accidenté et connaissant des problèmes d’érosion et d’irrigation, 35 % seulement des terres sont cultivables. Le problème de l’accès à l’eau est en voie de résolution grâce aux efforts des organisations paysannes, toutefois la monoculture pratiquée par les paysans s’avère non rentable, engendrant de brusques variations des revenus et donc de leur niveau de vie. L’action vise à diversifier le nombre d’espèces cultivées, à travers la production de plantes maraîchères à cycle court, dans des mini-serres, afin de garantir aux familles une alimentation équilibrée, mais aussi de réduire les fluctuations du marché des produits traditionnels. En vue d’assurer la continuité du projet dans le temps, des activités de formation technique ainsi que de responsabilisation des communautés dans la gestion des cultures seront mises en place. La gestion des subsides accordés par l’Etat belge (75 % du total du financement du projet) est confiée aux représentants d’ IEDECA et de Partenaire (qui a envoyé un seul coopérant, ingénieur agronome).
Les stratégies et les objectifs du projet qui se déroule en Bolivie sont à peu près identiques à celles du précédent : avec le concours de l’ONG bolivienne DESEC, il cherche à transformer les conditions de vie des communautés villageoises de l’ouest de Cochabamba, par la consolidation des organisations de base, l’amélioration des techniques agricoles et d’élevage, l’éducation des populations à de nouvelles habitudes alimentaires, et l’aménagement de 80 km de chemins vicinaux qui désenclaveront une douzaine de villages.
Partenaire se veut clair sur le cadre contractuel non paternaliste du travail avec les acteurs du Sud : il « doit s’axer préférentiellement sur l’échange des expériences plutôt que sur l’imposition d’un schéma unilatéral de développement. Toute action envisagée sera mesurée à l’aune de son impact sur le développement socio-économique du bénéficiaire. Elle sera analysée avec le souci de la bonne gouvernance, de la transparence des réalisations et de la bonne gestion matérielle et financière ». Ses partenaires doivent, bien sûr, apporter du personnel compétent et l’infrastructure nécessaire à la réalisation du projet, mais leur contribution essentielle réside dans leur connaissance du contexte, des besoins, des possibilités de réussite du projet. Bref, dans sa qualité, voire dans sa pertinence.
« Et comme il s’agit de projets centrés sur les activités productives, personne n’est mieux placée que les femmes pour garantir leur viabilité » , ajoute Arthur Bodson. Aussi bien en Afrique que dans les Andes, elles constituent des interlocutrices incontournables pour la conception et la gestion d’un projet productif, parce qu’elles sont les plus directement impliquées dans ce genre d’activités. Pour l’avenir, Partenaire est à la recherche d’organisations de femmes africaines.
« Nous devons, bien sûr, respecter nos engagements et ensuite vérifier, contrôler beaucoup afin d’assurer la bonne gestion des fonds » . Le contrôle de l’utilisation des ressources constitue la seule source potentielle de difficultés avec le partenaire ; « potentielle » , car, précise-t-il, jusqu’à présent, il n’y a pas eu beaucoup de problèmes : « La difficulté réside dans la rigueur qu’on essaye d’y mettre ; les gens n’aiment pas qu’on soit trop exigeant à cet égard ».
Quant à la recherche des synergies avec d’autres acteurs sociaux ou politiques, Partenaire considère qu’elle rentre dans les stratégies du partenaire local : « L’un des critères de sélection des partenaires du Sud est qu’ils soient reconnus par les pouvoirs publics locaux » . Arthur Bodson admet toutefois que son ONG n’a pas encore cherché à réaliser des projets en commun avec d’autres ONG belges : « C’est une lacune, c’est une erreur, parce que cela n’aide pas à lutter contre la dispersion des actions de développement ».
Toute ONG fait, bien entendu, référence à un modèle de développement, associé plus ou moins directement à une certaine idéologie politique. Il s’agit ici toutefois d’une ONG qui représente explicitement un parti politique, et qui plus est, libéral. Pour Partenaire, cette situation comporte des désavantages, mais elle constitue en même temps un atout : « A la différence des organisations comme Médecins sans frontières ou la Croix-rouge, qui s’occupent des problèmes qui échappent aux choix politiques, dans le sens qu’ils s’occupent de soigner les gens le plus vite possible, le fait d’être une ONG politique présente l’inconvénient d’avoir l’air de servir une cause particulière. C’est moins pur. Et cela désunit un peu, cela contribue à la dispersion. C’est un peu d’embêtant, mais c’est comme ça ».
Par contre, cette appartenance politique permet de mettre l’accent sur ce que l’on considère comme le plus important pour le développement : « Une ONG fait toujours référence à des valeurs. Quand on pense au développement, on ne peut pas ne pas faire référence à des valeurs. Le choix libéral c’est la liberté d’entreprendre et la responsabilité. Cela dit, je crois en l’utilité de l’existence de différents points de vue sur le développement, parce qu’elle installe une diversité dans le monde de la coopération ».